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aventures du baron de münchhausen.

fileuse. Non loin de là se trouvait un personnage d’une corpulence digne de John Falstaff, et qui tenait son index appuyé sur sa narine droite. Dès qu’il eut aperçu notre détresse et vu comme nous nous débarrions misérablement dans l’ouragan, il se tourna vers nous, et tira respectueusement son chapeau avec le geste d’un mousquetaire qui se découvre devant son colonel. Le vent était tombé comme par enchantement, et les sept moulins restaient immobiles. Fort surpris de cette circonstance qui ne me semblait pas naturelle, je criai à l’homme :

— Hé ! drôle ! qu’est-ce là ? As-tu le diable au corps, ou es-tu le diable en personne ?

— Pardonnez-moi, Excellence, répondit-il ; je fais un peu de vent pour mon maître le meunier ; de peur de faire tourner ses moulins trop fort, je m’étais bouché une narine.

— Parbleu, me dis-je à moi-même, voilà un précieux sujet : ce gaillard-là te servira merveilleusement, lorsque, de retour chez toi, l’haleine te manquera pour raconter les aventures extraordinaires qui te seront arrivées dans tes voyages.

Nous eûmes bientôt conclu notre marché. Le souffleur quitta ses moulins et me suivit.