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n’eût pas daigné s’apercevoir de sa présence.

« Plangon ! ma chère, ma belle Plangon ! si vous ne voulez pas que je meure, rendez-moi vos bonnes grâces, aimez-moi comme autrefois. Je te jure, ô Plangon ! que je me tuerai à tes pieds si tu ne me relèves pas avec une douce parole, un sourire ou un baiser. Comment faut-il acheter mon pardon, implacable ? Je suis riche, je te donnerai des vases ciselés, des robes de pourpre teintes deux fois, des esclaves noirs et blancs, des colliers d’or, des unions de perles. Parle ; comment puis-je expier une faute que je n’ai pas commise ?

— Je ne veux rien de tout cela ; apporte-moi la chaîne d’or de Bacchide de Samos, dit Plangon avec une amertume inexprimable, et je te rendrai mon amour. »

Ayant dit ces mots, elle se laissa glisser sur ses pieds, traversa la chambre et disparut derrière un rideau comme une blanche vision.

La chaîne de Bacchide la Samienne n’était pas, comme l’on pourrait se l’imaginer, un simple collier faisant deux ou trois fois le tour du cou, et précieux par l’élégance et la perfection du travail ; c’était une véritable chaîne, aussi grosse que celle dont on attache les prisonniers condamnés au travail des mines, de plusieurs coudées de long et de l’or le plus pur.

Bacchide ajoutait tous les mois quelques anneaux à cette chaîne ; quand elle avait dépouillé