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ment d’orgueil ineffable en voyant son maître si bien habillé et si bien coiffé, et il courut prendre un miroir qu’il posa devant le duc.

« Monsieur, je suis content de moi ; vous êtes au mieux, et je ne crois pas que monsieur rencontre beaucoup de cruelles ce soir.

— Si monsieur avait la figure peinte en noir, il serait bien plus beau encore, mais il est bien comme cela, ajouta Similor, toujours attentif à se maintenir en faveur et à ne pas se laisser dépasser en flagornerie par l’astucieux Giroflée.

— Similor, appelez Marmelade, » dit le duc. Marmelade parut ; c’était un nègre de grande taille. « Faites atteler le carrosse. »

La voiture prête, le duc descendit en fredonnant un petit air ; il portait à son cou, dans un petit corbillon, le faux Fanfreluche avec la plus parfaite sécurité. — L’équipage du duc était du meilleur goût et conforme au dernier patron de la mode : cocher énorme, bourgeonné, ivre-mort, avec la coiffure à l’oiseau royal, un lampion volumineux, des gants blancs, des guides blanches, un monstrueux collet de fourrure ; des laquais à la mine convenablement insolente, portant des torches de cire, deux devant et trois derrière, le tout dans les règles les plus étroites. Le carrosse était sculpté et doré, avec les armoiries du duc sur les panneaux, et d’une magnificence tout à fait royale. — Quatre grands mecklembourgeois, alezan brûlé, la crinière tres-