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une espèce d’œil-de-bœuf, s’enchâssait un globe de verre rempli d’une eau claire et splendide où sautelaient des poissons bleus à nageoires d’or ; leur mouvement perpétuel faisait miroiter la chambre de reflets changeants et prismatiques de l’effet le plus bizarre. ― Précisément au-dessous de ce globe, un petit jet d’eau dardait en l’air son mince filet de cristal, tremblotant au moindre souffle, et qui retombait sur une vasque de porphyre en pluie perlée et grésillante. ― Dans un angle se balançait un hamac de fibres de latanier, et dans l’autre un hooka magnifique tortillait ses anneaux noirs et souples autour d’un vase à rafraîchir la fumée, en cristal de roche, enjolivé de filigranes d’argent. ― C’était tout.

« Asseyez-vous, belle reine, dit Fortunio en enlevant avec beaucoup de dextérité le cachemire de Musidora ; ― et il la conduisit par le bout de la main dans l’angle du divan.

« Mettez ce coussin derrière vous, et celui-ci sous votre coude, et cet autre sous vos pieds. ― Là, bien ; ― voyez-vous, il n’y a que les Orientaux qui sachent s’asseoir convenablement, et un de leurs poètes a fait ce distique, qui a plus de sens que toutes les philosophies du monde : ― Mieux vaut être assis que debout, couché qu’assis, mort que couché. ― Trouvez-moi donc, dans toutes les lamentations des rimeurs à la mode quelque, chose qui vaille le simple distique du bon Ferid-ed-Din Atar. »