Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 1.djvu/47

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Maxwel, Puységur, Deleuze et les plus habiles, dans des expériences vraiment prodigieuses, mais qui ne me contentaient pas encore : catalepsie, somnambulisme, vue à distance, lucidité extatique, je produisis à volonté tous ces effets inexplicables pour la foule, simples et compréhensibles pour moi. ― Je remontai plus haut : des ravissements de Cardan et de saint Thomas d’Aquin je passai aux crises nerveuses des Pythies ; je découvris les arcanes des Époptes grecs et des Nebiim hébreux ; je m’initiai rétrospectivement aux mystères de Trophonius et d’Esculape, reconnaissant toujours dans les merveilles qu’on en raconte une concentration ou une expansion de l’âme provoquée soit par le geste, soit par le regard, soit par la parole, soit par la volonté ou tout autre agent inconnu. ― Je refis un à un tous les miracles d’Apollonius de Tyane. ― Pourtant mon rêve scientifique n’était pas accompli ; l’âme m’échappait toujours ; je la pressentais, je l’entendais, j’avais de l’action sur elle ; j’engourdissais ou j’excitais ses facultés ; mais entre elle et moi il y avait un voile de chair que je ne pouvais écarter sans qu’elle s’envolât ; j’étais comme l’oiseleur qui tient un oiseau sous un filet qu’il n’ose relever, de peur de voir sa proie ailée se perdre dans le ciel.

« Je partis pour l’Inde, espérant trouver le mot de l’énigme dans ce pays de l’antique sagesse. J’appris le sanscrit et le pracrit, les idiomes