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zel qu’il composait en l’honneur de la princesse Ayesha, ghazel où les lis d’Iran, les fleurs du Gulistan, les étoiles et toutes les constellations célestes se disputaient pour entrer.

Le lendemain, Mahmoud-Ben-Ahmed, dès que le jour parut, fit cette réflexion qu’il n’avait pas de sachet de benjoin, qu’il manquait de civette, et que la bourse de soie brochée d’or et constellée de paillettes, où il serrait son latakié, était éraillée et demandait à être remplacée par une autre plus riche et de meilleur goût. Ayant à peine pris le temps de faire ses ablutions et de réciter sa prière en se tournant du côté de l’Orient, il sortit de sa maison après avoir recopié sa poésie et l’avoir mise dans sa manche comme la première fois, non pas dans l’intention de la montrer à son ami Abdul-Malek, mais pour la remettre à la princesse Ayesha en personne, dans le cas où il la rencontrerait au bazar, dans la boutique de Bedredin. Le muezzin, perché sur le balcon du minaret, annonçait seulement la cinquième heure ; il n’y avait dans les rues que les fellahs, poussant devant eux leurs ânes chargés de pastèques, de régimes de dattes, de poules liées par les pattes, et de moitiés de moutons qu’ils portaient au marché. Il fut dans le quartier où était situé le palais d’Ayesha, mais il ne vit rien que des murailles crénelées et blanchies à la chaux. Rien ne paraissait aux trois ou quatre petites fenêtres obstruées de treillis