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sans honneur et sans courage ; ce parti extrême, il ne l’avait d’ailleurs pris qu’après trois ans de luttes et de souffrances, au moment où sa vie, consumée par l’amour, allait lui échapper. Il ne connaissait pas le comte ; il n’était pas son ami ; il ne lui devait rien, et il avait profité du moyen hasardeux que lui offrait le docteur Balthazar Cherbonneau.

Où prendre des témoins ? sans doute parmi les amis du comte ; mais Octave, depuis un jour qu’il habitait l’hôtel, n’avait pu se lier avec eux.

Sur la cheminée s’arrondissaient deux coupes de céladon craquelé, dont les anses étaient formées par des dragons d’or. L’une contenait des bagues, des épingles, des cachets et autres menus bijoux ; l’autre des cartes de visite où, sous les couronnes de duc, de marquis, de comte, en gothique, en ronde, en anglaise, étaient inscrits par des graveurs habiles une foule de noms polonais, russes, hongrois, allemands, italiens, espagnols, attestant l’existence voyageuse du comte, qui avait des amis dans tous les pays.

Octave en prit deux au hasard : le comte Zamoieczki et le marquis de Sepulveda. ― Il ordonna d’atteler et se fit conduire chez eux. Il les trouva l’un et l’autre. Ils ne parurent pas surpris de la requête de celui qu’ils prenaient pour le comte Olaf Labinski. ― Totalement dénués de la sensibilité des témoins bourgeois,