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L’Automne.

Aussi qu’ils ne sçavoient, pauvres, en quelle main
Ils dévoient de Beau-jour reprendre le chemin :
Voyles-là demeurez ; car ny chemin, ny sente,
A plus de deux cents pas de là ne se présente ;
Tant que seuls demeurez, ils ne voyent autour,
Aucun, pour leur monstrerle chemin de Beau-jour.
Et là, c’est le plaisir, car si l’un veut débattre
Que c’est de ce costé, cil plus opiniastre
Impugne le contraire, et dict, par tel endroict
On va droict à Villiers, et par l’autre on va droict
Le chemin de Beau-jour : et l’autre dit, je gaige
Que c’est celuy d’Ivor, et là celuy de Grage.
Ils disputent si bien, que jà l’obscure nuict
Faisoit des champs loingtains oyr les cris et bruict ;
Que desja s’entendoient heurler par les rivages
Les loups, et les mastins aboyer aux villages ;
Desja le bocquillon, d’un long travail cassé,
Rentré dans sa maison, se reposoit, lassé.
Or il faict jà si noir, qu’ils n’ont plus d’espérance
De voir meshuy Beau-jour, plus seure demeurance
Que cette forest creuse, où jà mal plaisamment,
On entendoit des loups le sauvage heurlement.
Il fault qu’ils couchent là, bon gré, malgré qu’ils ayent,
Car la longueur du nez, à grande peine, ils voyent.
Hz trouvent, de bon heur, quattre grandz houx es-Les
uns aux autres joincts esloignez d’autre bois, [poix
Où, tournans à l’entour, ils trouvent de l’espace
Pour entrer au dedans la se void une place
De huict pieds en carré, où sur le hault du jour,
Les Pasteurs seurement alloient faire l’amour, (a)

a. Var. :

Les Pasteurs pour dormir alloient faire séjour.