Page:Gasztowtt - Le Poète polonais Jules Slowacki, 1881.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’éprit de cette jeune fille… Vous le savez, c’est encore le sort des poètes. Amoureux des étoiles, ils lèvent toujours les yeux plus haut qu’il ne faut, ils veulent toujours réaliser l’impossible, et dans la vie de presque tous on trouve dès le début quelque rêve de ce genre cruellement déçu, quelque blessure au cœur qui ne se guérit jamais entièrement. Ce n’est pas à nous de nous en plaindre : c’est à ces amours, insensés selon le monde, que nous devons les plus belles créations de l’art. La Béatrice du Dante, la Laure de Pétrarque, comme celle de Mickiewicz (faut-il y ajouter la Béatrice de Krasinski ?), ne sont-elles pas, après tout, les muses réelles qui ont remplacé les filles de Mémoire de l’antiquité ? Et devons-nous regretter qu’au prix même de cruelles souffrances il ait été donné à Slowacki d’ajouter à ce chœur d’immortelles, à ces anges de la poésie, une sœur de plus dans la personne de cette Louise qu’à toutes les époques de sa vie il chante sans cesse dans ses heures de méditation, dans ses élans d’amour vers le passé, vers sa jeunesse envolée, vers sa patrie perdue ?

Sans doute plus d’une fois le poète rencontra dans sa vie d’autres consolatrices ; il en est jusqu’à quatre que je pourrais nommer ; à Paris, à