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Il mourut. Je pensais alors, — cruel destin ! —
Que si le Ciel des miens n’épargnait pas le reste,
Que s’il nous renvoyait l’ange noir de la peste,
Il me prendrait l’enfant, — ma femme, — et puis qu’enfin
J’irais moi-même aussi rejoindre ma famille.
Ma fille ! Oh ! je n’osais point penser à ma fille !
Je ne pouvais avoir de crainte sur son sort :
Elle était belle et jeune à désarmer la mort,
Et si joyeuse quand entre ses deux mains blanches
Elle prenait ma tête et me baisait au front,
Quand elle travaillait, en courant sous les branches,
Au filet qui du cèdre environnait le tronc,
Ainsi qu’une hirondelle active et diligente !
Regarde ! Vois-tu bien ma ceinture brillante ?
C’est elle qui l’a faite ; et sur mes tristes yeux
Souvent elle venait pencher ses blonds cheveux ;
Si bien que je voyais son sourire et ses charmes
Comme on voit une rose au travers de ses larmes.
Sur toute ma maison elle régnait si bien !
Elle était là toujours comme un ange gardien,
Dans le petit berceau veillant son petit frère ;
Vers quiconque pleurait accourant la première
Elle sut compatir à toutes nos douleurs,
Et sur son front charmant tombèrent tous nos pleurs.