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au monde écheoir pour être informé justement de toutes nouvelles ; car là sont et s’y trouvent moult volontiers, tous chevaliers et écuyers étrangers, pour la haute noblesse de lui ; et de tout ainsi comme je l’imaginay, il m’en avint. Si remontray ce, et le voyage que je vouloye faire à mon très redouté seigneur le comte de Blois lequel me bailla ses lettres de familiarité adreçans au comte de Foix. Et tant chevauchai, enquerant de tous cotez nouvelles, que par la grace de Dieu, sans péril et sans dommage, je vins en son hostel à Ortais, au pays de Béarn, le jour sainte Catherine (25 novembre) de l’an de grâce MCCCLXXXVIII. Lequel comte de Foix, sitost comme il me veit, me fit bonne chère[1] et me dit en riant en bon françois que bien il me cognoissoit et se ne m’avait oncques mais veu, mais plusieurs fois avoit ouy parler de moi. » Ce fut à Orthez que Froissard recueillit en grande partie les matériaux de ses deux derniers volumes.

Chacun se prêtait à lui fournir des détails sur les faits de cette époque. Il en recevait même du comte de Foix qu’il voyait tous les jours. Chaque soir, après souper, il lui lisait quelques passages de l’Histoire de Méliadus et de Gyron le Courtois. Ce roman, qui fait partie du cycle de la table ronde, avait été composé par Hélie de Borron pour le roi d’Angleterre Henry III. Il ne laissait donc pas d’avoir quelques années de date. Néanmoins les copies en étaient encore rares ; mais Froissard en avait apporté une, et Gaston prenait le plus grand plaisir à l’entendre.

La cour d’Orthez avait alors repris son ancienne splendeur. La présence de Jeanne, fille du comte de Boulogne, en augmentait encore l’éclat. La garde et la tutelle de cette jeune princesse avaient été confiées au comte Gaston, son parent. Les partis les plus

  1. Chère, visage, c’est le mot espagnol cara :

    Cil partout où il vous rencontre
    Belle chière et lye vous monstre,
    Et de vous saluer ne cesse.

    (Roman de la Rose, vers 13037.)