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ont les chiens mestier[1] de confort et de rebaudissement.

Huet des Vantes et le sire de Montmorenci orent[2] de trop biaus lengaiges et trop bonnes consonnances et bonnes vois et bonnes manières et belles de parler à leurs chiens.

Chiens faillent voulentiers les cerfs ès voyes et ès chemins, par trop de raysons ; quar leur cuer, ne leur pensement ne les aporte mie que le cerf doye avoir fuy les voyes ne les chemins ; et pour ce ne vuelent mettre poine à requerir les chemins au long ; et supposé qu’ils vousissent bien metre le nez à terre, et requérir les chemins, si ne pevent si bien en assentir comme en autre lieu, par trop de raysons ; quar quant le cerf fuyt les fours[3], il touche du corps et de la teste au boys, et par dessouz ès herbes, et les chiens en assentent partout ; et quant il vet la voye, il ne touche fors que par le pié en terre ; si n’en pevent les chiens si bien assentir. Aussi quant il fuit le chemin, le souleill qui fiert dessus hasle toutes les routes et eschauffe la terre, et oste l’umour, que les chiens n’en pevent bien assentir. Et aussi si les chiens metent le nez au bois ou ès herbes ilz en assentent ; et s’ilz le metent sur le chemin, et ils tirent à eux pour en avoir et ressentir, la poudre les donra[4] par les narines et par le nez qui toudra[5] le ressentir. Aussi aucunefois avient que ès forès et bruyères et ès landes pastouriaus boutent le feu et bruslent le pays pour revenir l’erbe nouvelle pour leur bestaill. Et quant chiens viennent chassant jusques aux brusleis, jamais ne chasseroient outre, parmi le brusleis, pour trop de raysons. Ansois retournent arrière ; quar ils n’en pevent assentir ou brusleis ; quar tu sces que se tu passes près d’une charoinhe tu sentiras la puour ; mes si tu

  1. Mestier, besoin. C’est le mot espagnol menester.
  2. Orent, eurent.
  3. Fuyt les fours… fuit au milieu des forts
  4. Les donra… leur donnera.
  5. Toudra, et, suivant le manuscrit de Neuilly, touldra. Futur du verbe tollir, enlever, ôter.