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Il dort. Et les rochers, les monts bleus, les nuages,
Abaissent, fait d’amour, d’astres et de feuillages,
Un regard paternel sur leur fils endormi.
La forêt le contemple et l'anime à demi,
Car parfois un frisson créateur la traverse,
Et le même frisson, sur Adam qu’elle berce,
Vient à ses bras obscurs mêler un être ami.
Et Dieu tire de lui son rêve qui frémit.
Un être vague, ardent comme le vent qui rôde,
S’assied au fond brumeux de son âme encor chaude.
Ce brouillard lui sourit sous de longs cheveux d’or.
Deux beaux pieds éclatants, près de son front qui dort,
Se posent doucement comme deux tourterelles.
Le parfum de l'aurore entr’ouvre ses prunelles.
La mer rougit, le jour tombe du ciel, il sent
Toute l’humanité s’émouvoir dans son sang,
Car, de tous les désirs de l’univers suivie,
La femme vient d’entrer, splendide, dans la vie.

O corps silencieux, flancs baignés de lueur,
Visage de son âme, âme de sa douleur,