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Aix s’endort chaque soir aux pieds de la Victoire,
Le ciel avec lenteur sur la ville descend
Et dans l’air flotte alors un peu de cette histoire
Qu’au front des vieux hôtels un blason qui se fend
Révèle aux amoureux des gloires disparues.
De la vulgarité ta douceur te défend,
Ô ville ! l’herbe pousse aux pavés de tes rues.
Dante, sur ces pavés, et des rois ont marché.

 
Et moi, de ce coteau, dans les herbes couché,
Sous un bouquet de pins, quand l’air en feu brasille,
Comme une urne brisée au pied d’un large autel,
Je regarde au soleil fumer la vieille ville.
Aix m’apparaît avec son visage immortel,
Sous ses pierres je sens battre son cœur réel.
Ô cité, ton présent sans splendeur t’abandonne
Et de ses mains de feu le soleil te couronna.
Et comme je te veux, ô ville, tu deviens.


Mais, les flancs alourdis du poids de notre gloire,
Vers moi, dans les rochers, parmi les buis, tu viens,
Femme, et j’embrasse en toi la ville et la Victoire.