Page:Gaskell Craik - Trois histoires d amour.djvu/263

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quelques semaines plus tard, arrivant un soir à l’improviste, ma mère me dit :

— Devinez où Jeanne a été.

Elle aurait pu traverser les mers, tant je tressaillis : mais elle était seulement allée dans les environs de Belgrave-Square, région qui nous était si familière autrefois, et qui nous était maintenant aussi étrangère que l’Afrique. Mille pensées me traversèrent l’esprit sur-le-champ, mais je dis seulement :

— Elle n’aurait pas dû aller seule ; qui voulait-elle voir ?

— Je n’en sais rien ; elle m’a dit d’attendre son retour. Ah ! la voilà ; eh bien, ma belle ?

Belle n’était pas précisément le mot, et cependant elle avait un charme étrange : ses yeux brillaient comme jadis ; la majesté de sa démarche avait reparu comme autrefois lorsqu’au milieu de toutes les splendeurs elle semblait à la fois à son aise et au-dessus de tout ce qui l’entourait. Elle embrassa ma mère et alla ôter son chapeau, en disant que nous saurions tout dans une minute ; mais plusieurs minutes s’écoulèrent, et lorsqu’elle revint l’éclat inaccoutumé avait disparu ; c’était notre Jeanne, calme comme de coutume.

— Oui, Marc, j’ai fait un coup hardi, j’ai pris des engagements sans que vous le sussiez, sans