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Lady Erlistoun l’avait-elle entendu ou non ? Je crois qu’elle l’avait entendu et compris. Elle prit la main de Jeanne entre les siennes, et dit, du fond d’un cœur qui avait peut-être battu fidèlement et même passionnément autrefois, peut-être pour un autre lord Erlistoun, puisqu’elle s’était mariée à vingt ans :

— Je ne souhaite pas à mon fils d’aimer une plus noble femme.

À partir de ce jour, je cessai d’éviter aussi complètement l’amant de Jeanne ; son amour m’intéressait malgré moi, cette recherche persévérante et ce culte absorbant pour la femme qui s’était emparée non seulement de son imagination, mais de ce qu’il y avait de meilleur en lui, et qui était devenue pour lui quelque chose de plus noble et de plus pur qu’une passion, un idéal.

La passion d’ailleurs n’y manquait pas, des jalousies violentes, des colères passagères, tout ce pétillement d’un feu qui brûle, vivement, et vite… mais on ne s’en aperçoit pas tant qu’il brûle.

Un jeune homme passionnément et profondément épris d’un amour désintéressé a toujours quelque chose en lui qui mérite le respect. Et tant que les femmes seront des femmes, tant que l’amour qu’elles inspirent élèvera et ennoblira leur nature comme l’amour ennoblit celle d’un homme,