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ma cousine Jeanne, et ensuite en avoir un peu peur.

Faut-il devenir aveugle parce qu’on passe sa vie en face d’un grand-livre, ou sourd parce qu’on entend constamment froisser des billets de banque ou compter de l’or ? Je n’étais ni l’un ni l’autre.

Je tiens à rendre justice à tous ces braves gens qui étaient mes parents ; il y avait parmi eux beaucoup de bonnes femmes, de bonnes mères, de bonnes filles, aimées et agréables chez elles, bien qu’un peu gauches et embarrassées chez nous, plus encore que nous-mêmes. Mais lorsque Jeanne traversa la chambre avec sa robe noire d’une riche étoffe, lorsque sa douce voix se fit entendre à travers cette Babel de voix bruyantes, quel contraste ! Et cependant elle était du même sang ; sa mère était une Browne. Mais la nature elle-même l’avait faite ce qu’elle était ; peut-être différait-elle de toutes les autres femmes comme de celles-là. Oh ! quelle différence !

Je n’étais pas le seul à m’en apercevoir ; d’autres yeux la suivirent quand elle traversait la chambre pour revenir ensuite sur ses pas. Une ou deux fois, au moment où elle parlait, je vis lord Erlistoun abandonner les livres d’estampes dont il s’était emparé, comme d’un refuge, pour écouter Jeanne.