Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


XIII


Il fallait faire diligence pour nous retrouver sur la ligne avant le retour des ouvriers ; aussi échangeâmes-nous à peine quelques mots, et toute l’après-midi fut trop activement employée pour laisser place à la moindre causerie.

Nous rentrâmes le soir à Hornby, dans le logement que nous occupions en commun. Là, sur la table, se trouvait une lettre qu’on avait renvoyée d’Eltham à la nouvelle adresse de mon chef. Pendant que je me jetais affamé sur le thé qui nous attendait, il la lut à loisir et resta quelques instants silencieux.

« Mon camarade, s’écria-t-il enfin, je crois que je vais vous quitter.

— Comment ? me quitter !… que voulez-vous dire ? Où iriez-vous ?

— Cette lettre, répondit-il, aurait dû m’être acheminée plus tôt. Elle est de l’ingénieur Greathed (une célébrité de ce temps-là). Il veut me voir, il désire me parler… Eh ! tenez, Paul, pourquoi vous le cacherais-je ? il est question de m’envoyer surveiller les travaux d’une ligne projetée au Canada.

— Et notre compagnie, que dira-t-elle ? m’écriai-je, véritablement déconcerté.

— Vous savez que Greathed en est le principal agent, et c’est lui qui sera l’ingénieur en chef de la ligne canadienne. Nos actionnaires prendront sans doute de grands intérêts dans cette dernière, et par conséquent se prêteront à toutes les combinaisons de personnel que Greathed aura jugées utiles… Mon remplaçant est déjà choisi.