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France, aurait été aussi transparent que possible ; mais Phillis n’y était point faite, il la troublait et l’embarrassait au plus haut point. Lui reprocher de « n’être pas chrétienne, » c’était là une accusation des plus graves, c’était prononcer un mot dont il est interdit de se jouer. Et bien qu’elle ne comprît pas très-nettement en quoi elle avait pu faillir, elle cherchait néanmoins une excuse.

Holdsworth tout d’abord parut s’amuser du sérieux avec lequel cette innocente se disculpait de toute mauvaise intention ; mais plus la plaisanterie se continuait, plus elle jetait de perplexités dans l’âme naïve de celle qui en était l’objet. À la fin cependant, d’un ton plus grave, trop bas pour être entendu de moi, il lui adressa quelques mots qui la firent taire immédiatement, et qui appelèrent sur ses joues une rougeur singulière.

Le ministre parut bientôt, pliant sous le faix des châles, manteaux et parapluies qu’il nous rapportait. En revenant à la ferme, Phillis se tint constamment fort près de lui : elle me paraissait éviter Holdsworth, qui gardait pourtant vis-à-vis d’elle la même attitude placide, protectrice, attentive.

Je passe sur les détails du retour, et ne me serais pas arrêté aux incidents de cette première soirée, si je ne m’étais souvent demandé, dans le temps, ce qu’il avait pu dire tout bas à Phillis pour la réduire si vite au silence, — et aussi parce que les événements survenus depuis prêtent une certaine importance à ce qui venait alors de se passer.