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X


Ce jour-là, Holdsworth vint au-devant de moi jusque Heathbridge. Il était tout différent de ce que je l’avais laissé, les joues hâlées et brunies, le regard brillant, la démarche ferme, et je dus lui en faire compliment.

« Oui, me dit-il, me voilà remis sur pied. L’envie de travailler m’est revenue. Cette semaine aux champs m’a fait grand bien.

— Et sans doute aussi grand plaisir ?

— Je vous en réponds. L’excellente vie, et combien je me trompais en redoutant la monotonie dont on l’accuse ! On ne s’ennuie jamais avec le ministre.

— Ah ! m’écriai-je soulagé, vous avez donc fini par vous convenir ?

— J’ai failli le mécontenter deux ou trois fois par quelques-unes de ces locutions outrées dont on se sert avec les gens de notre monde, sans, que cela tire à conséquence ; mais quand j’ai vu qu’elles choquaient ce digne homme, j’ai pris soin de veiller sur ma langue, et somme toute je m’en trouve fort bien. S’il est un exercice salutaire, c’est celui qui consiste à tâcher de rendre sa pensée par les mots les plus simples et les plus exacts, sans s’occuper de l’effet qu’on va produire.

— Vous êtes donc très-bons amis ?

— Pour ce qui me concerne, je puis vous le garantir. Jamais je n’ai rencontré pareille soif de science. Sur tout ce qui s’apprend par les livres, le ministre est bien autrement ferré que moi ; mais j’ai sur lui l’avantage d’avoir couru le monde et d’avoir vu bien des choses… À pro-