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nait. Ce fut elle qui dut engager la conversation : « Vous travaillez donc beaucoup, mon cousin ?… Mais alors, reprit-elle quand je lui eus expliqué l’emploi quotidien de mes heures, vous n’avez guère le temps de lire ?

— Vraiment non, répondis-je, songeant à part moi que la lecture tiendrait une bien petite place dans les loisirs que j’aurais pu me procurer.

— Moi non plus, reprit-elle, et je le regrette fort… Si seulement on me laissait me lever en même temps que mon père.

— À quelle heure se lève-t-il ?

— À trois heures, répondit-elle, — et j’avoue que ces mots me donnèrent le frisson.

— À trois heures ! répétai-je abasourdi, que peut-on avoir à faire si bon matin ?

— Hé ! le temps lui manque toujours. C’est lui qui sonne la grosse cloche pour faire lever les bergers ; c’est lui qui réveille Betty, notre domestique. Le charretier, Jem, est un peu vieux, mon père le laisse volontiers dormir, mais encore faut-il que les chevaux mangent. C’est encore mon père qui vérifie les harnais et qui les répare au besoin. Il écrit ensuite la commande, soit de nourriture pour les hommes, soit de fourrage et d’avoine pour le bétail. Si tout cela lui laisse un peu de temps, il vient me trouver, et nous lisons, mais de l’anglais seulement à cette heure-là ; nous gardons le latin pour la soirée, où nous avons le loisir de nous y complaire. Bref, tout cela et bien d’autres choses l’occupent jusqu’à six heures et demie, heure où nous déjeunons.

— Heure où je dors encore, pensai-je avec quelque remords ; mais heureusement nous approchions du terme de notre course.

— Regardez, cousin Paul, me dit Phillis, regardez