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un tison massif se consumait lentement dans l’âtre, en face de la fenêtre ouverte. La tante Holman était installée au dehors et reprisait du linge. Phillis, assise au même endroit où je l’avais quittée, était occupée du même tricot, et on pouvait la soupçonner d’y avoir travaillé toute la semaine. La treille qui montait le long du mur encadrait de ses feuilles brunies ce blanc visage que j’avais revu plus d’une fois, les yeux fermés, pendant ces quelques journées.

Les volailles bigarrées couraient et caquetaient dans la cour de la ferme, où les vases à lait, suspendus comme des trophées, se purifiaient, s’aéraient au grand soleil. Des fleurs partout, et jusque sur le sentier, semées avec profusion par la main de l’homme ou celle du hasard. Mon habit, imprégné de leurs parfums, garda quelques jours encore, à partir de celui-ci, l’odeur de l’églantier et de la fraxinelle. Les pigeons au plumage marbré guettaient l’instant où la chère tante, prenant une poignée de graines dans un panier placé à ses pieds, la dispersait autour de sa chaise. Quels battements d’ailes, et comme ils roucoulaient pendant la joyeuse picorée !

Ce fut mistress Holman qui m’aperçut la première.

« Phillis, cria-t-elle, votre cousin Manning !

— Pour Dieu, ma tante, appelez-moi Paul, lui dis-je aussitôt ; je ne suis Manning que dans nos bureaux.

— Eh bien ! Paul, votre chambre vous attend ; mais le ministre, n’étant rien moins que certain de vous voir arriver est allé du côté d’Ashfield, où la petite va vous conduire, si vous voulez. Allons, Phillis, votre chapeau, et dépêchons-nous ! »

Une fois en route, je cherchai, non sans quelque trouble intérieur, ce que je pourrais dire d’agréable à mon guide. Je l’aurais voulue de ma taille, et sa supériorité me gê-