Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/322

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rougissant, hésitant quelque peu… Veuillez jeter les yeux sur ce papier… Il a été trouvé sous l’oreiller de mon père, immédiatement après sa mort… Il a trait à des choses… bien passées, mais il vous fera peut-être penser plus favorablement de ce pauvre père… »

Le juge avait pris le fragment de lettre, et il le lut rapidement.

— Malheureux homme, dit-il enfin, le replaçant sur la table… Il a dû bien souffrir à la suite de cette nuit fatale… Et vous donc, Ellenor ! »

Oui, certes, elle avait souffert, et — bien qu’il feignît de l’oublier, — celui qui la plaignait ainsi n’était pas la moindre cause de ses souffrances. Elle ne répondit que par un léger hochement de tête. Puis elle le regarda, — maintenant ils étaient debout, presque face à face, — et, le regardant, elle lui dit :

— Si je ne me trompe, je serai désormais moins à plaindre. Jamais je n’ai douté que cette désastreuse affaire ne finît par éclater… Maintenant, laissez-moi vous remercier encore, et recevez mes adieux… Cette lettre, je puis l’emporter, n’est-ce pas ? continua-t-elle en jetant un regard avide sur ce débris de papier auquel le juge ne semblait attacher aucun prix.

— Certes, certes, » dit-il, et il prit la main qu’elle avait étendue vers la table. Il retenait cette main, et regardait ce visage qui lui était tout d’abord apparu si altéré par le temps. En ce moment, je ne sais par quel mirage, il la retrouvait à peu près tel qu’il l’avait connu jadis. Même regard, doux et timide ; même fossette indiquée plutôt qu’inscrite sur la joue veloutée, où un léger mouvement de fièvre appelait quelques nuances d’un rose longtemps étranger à ce pâle visage. Tout marié qu’il était à une beauté reconnue, le juge se demanda involontairement s’il ne préférait pas cette douleur calme, cette toilette