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irrégularité désespérante. Il fallait donc qu’Ellenor, dans les dépêches dont elle avait à prendre connaissance, suppléât tout ce que ses correspondants se dispensaient de lui répéter, et devinât sous une foule d’allusions obscures les faits qu’ils supposaient connus d’elle.

Dans la lettre de miss Monro, — la première qu’Ellenor essaya de déchiffrer, — il était question de l’émotion publique produite par la découverte du cadavre de M. Dunster, qu’on avait retrouvé en creusant les tranchées du chemin de fer entre Hamley et la station suivante. Ce corps méconnaissable paraissait n’avoir été identifié qu’au moyen des lambeaux de vêtements dont il était encore couvert, surtout grâce à la montre avec cachet qui gisait dans son voisinage immédiat. Mais le plus terrible de l’affaire — et ce qui avait spécialement choqué les Osbaldistone, — c’était que dans les mêmes terrains, explorés avec un soin particulier on avait rencontré une flamme (ou lancette de vétérinaire) sur laquelle était gravé le nom d’Abraham Dixon. Or, dès le début des recherches qui devaient aboutir à ce résultat si menaçant pour lui, Dixon, que son maître, avait envoyé depuis déjà quelques semaines à une foire de chevaux, tenue en Irlande, avait eu justement la jambe cassée par une jument vicieuse ; en sorte que son arrestation avait été opérée sans la moindre difficulté, dans un faubourg de Tralee, par les agents dépêchés après lui…

Ici, Ellenor poussa une exclamation douloureuse, et, sans achever la lettre de miss Monro, rompit vivement une enveloppe sur laquelle l’écriture de M. Johnson était parfaitement reconnaissable. Antérieure de quelques jours à celle de miss Monro, cette dépêche ne mentionnait aucunement la désastreuse découverte. L’homme d’affaires se plaignait seulement de n’avoir encore aucune réponse à sa missive en date du 9 janvier, ajoutant que miss Wil-