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brouette qu’il avait amenée exprès, les bagages des deux voyageuses jusqu’à la cure, où les domestiques du défunt avaient tout préparé pour les recevoir.

M. Brown vint, dès le lendemain, indiquer à la légataire de Ness les mesures que nécessitait sa mise en possession. Elles étaient fort simples en elles-mêmes, mais Ellenor s’en fit un prétexte pour ne point sortir, si ce n’est aux heures de l’office. La plupart de ses meilleurs amis ou bien étaient morts, ou bien avaient quitté la ville ; deux ou trois restaient, auxquels miss Wilkins ouvrit volontiers sa porte. Un ou deux autres étaient tellement âgés ou tellement infirmes qu’elle se promit de les aller voir avant de quitter Hamley. En attendant, les visites se multipliaient, bien qu’on se dispensât, autant que possible, de les recevoir. Chaque soir, lorsque Dixon avait fini son travail chez M. Osbaldistone, il s’en venait au parsonage, sous prétexte de courses à faire, de livres à transporter, mais en réalité de par ce lien secret qui s’était formé entre Ellenor et lui, — lien dont ni l’un ni l’autre ne méconnaissaient la force, bien qu’ils évitassent avec soin toute parole qui aurait trop nettement impliqué, à leurs propres yeux, cette complicité inavouée.

Un soir, ils étaient ensemble dans la bibliothèque de la cure, — vieille pièce basse dont les fenêtres donnaient sur le jardin, — elle occupée à dresser un catalogue, tandis que son vieux serviteur lui passait tour à tour les volumes massifs ; leurs regards s’égaraient de temps à autre, franchissant les haies de chèvrefeuille qui, fraîchement arrosées par une pluie de mai, leur envoyaient des senteurs plus pénétrantes. Du parsonage, situé sur une hauteur, on voyait les prairies, étagées en pente douce, descendre graduellement jusqu’à la rivière, et dans une de ces prairies, des ouvriers terrassiers, munis de leurs instruments, étaient à l’œuvre sous le