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loyal, si jeune ! Cette vive image fait paraître le cousin plus réservé, plus terne, plus monotone. Pourra-t-elle jamais se résigner à devenir sa femme ? Vaincue à la fin par ses persévérantes obsessions, elle l’épouse. Le voilà au comble de ses vœux. Sa sombre demeure va s’égayer de cette chère présence ; il verra Sylvia parée des riches étoffes qu’il lui destine depuis longtemps. Elle sera là, toujours là. Elle y est en effet, mais passive, morne, sans épanchement et sans joie. Un mur de glace se dresse entre elle et lui. Ne serait-ce pas ce secret trop bien gardé ? ce message suprême que ses oreilles ont recueilli, que ses lèvres n’ont pas répété ? Si elle l’apprenait jamais !… Cette heure fatale arrive. L’autre est revenu. Il accourt. Sylvia est mariée ; Sylvia berce son enfant. « Il ne vous a rien dit, le misérable ! » Misérable en effet, car le mari n’osera plus regarder sa femme en face ; il a fui, et elle continuera, honorable et pure, sa vie décolorée. — Je m’arrête je n’ai voulu que donner une idée du haut sentiment moral développé avec tant d’art.

Cousine Phillis, publié dans le Cornhill’s Magazine, recueil fondé et dirigé par Thackeray, a la même délicatesse de touche. L’intérêt s’y concentre sur un amour méconnu, né d’une sympathie passagère et qu’une parole imprudente a nourri.

La situation, trop prolongée, dévoile un à un les ravages qu’un sentiment intense fait au cœur de la pudique et fière jeune fille, qui ne s’avoue pas à elle-même ce qu’elle éprouve. Les figures sont en parfaite harmonie avec le cadre rustique. On sent, aux descriptions du paysage baigné de rosée ou éclairé du soleil doux