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taient à ses yeux le monde connu. En dehors de ce cercle, et abstraction faite de M. Corbet, il n’était guère d’événements dont le contre-coup arrivât jusqu’à cette recluse volontaire. Mais elle ressentit vivement la mort du bon doyen, sur laquelle bien des gens, depuis dix années et plus, basaient leurs calculs ambitieux, et plus d’une fois elle sentit ses yeux se remplir de larmes, en regardant ces fenêtres closes où elle cherchait en vain le sourire bienveillant de ce digne homme. Le successeur ne tarda pas à être désigné. C’était un ecclésiastique appartenant à un comté lointain, et l’Enclos tout entier se mit en mesure de se procurer quelques renseignements sur les attenances, la fortune, les mœurs du nouveau dignitaire. Fort heureusement pour la curiosité dont il était l’objet, ce personnage tenait de près ou de loin à une famille inscrite au Livre de la Pairie. On apprit donc, en recourant à ce merveilleux almanach de la noblesse, qu’il avait quarante-deux ans, qu’il était marié depuis longtemps et père d’une nombreuse famille, — huit filles et un fils, disait le Peerage. On put penser dès lors que le Doyenné allait changer d’aspect, et on ne se trompait pas. Cette habitation si calme, si austère, où un vieillard sans compagne ni descendants achevait naguère sa solitaire existence, s’emplit de bruit, de mouvement, de tumultueuse allégresse. Les charpentiers, les menuisiers y besognèrent à toute heure pendant la saison d’été. Trois fenêtres de la façade reçurent des grilles, ce qui annonçait une nursery. Puis arrivèrent des wagons chargés de meubles ; puis, après l’emménagement, des visiteurs sans nombre, dont beaucoup en équipages. Ni miss Monro, ni même Ellenor ne se jugèrent d’assez grands personnages pour grossir le flot de ces porteurs de bienvenue ; mais du fond de leur retraite, elles n’en étaient pas moins au courant de tout ce qui se