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quoique je vous donne ce nom pour la dernière fois de ma vie.

« R. C.  »


« Mon père, reprit Ellenor, encore une fois, que signifie cette lettre ? »

Wilkins, sa lecture achevée, restait en silence, les yeux vaguement perdus dans la contemplation du foyer.

« Que sais-je, moi ? répondit-il en lui jetant un triste regard… Le monde est ainsi fait, je suppose… Tout va mal pour moi et les miens… Il en était de même avant cette nuit déplorable… Ce n’est donc pas cela, n’est-ce pas, ma chérie ?

— Oh ! mon père ! sanglota la pauvre enfant prosternée à ses pieds et cachant sa tête dans la poitrine de l’infortuné vieillard.

— Chère petite orpheline ! dit-il en passant sur ses cheveux une main caressante, par un geste auquel il l’avait habituée de bonne heure, où est ta mère, pour te consoler ?… Tu l’aimes donc bien, Nelly ?… il m’a semblé, pourtant, tous ces jours-ci, qu’il n’était pas bon pour toi. Quelque chose était arrivé à ses oreilles… Il me questionnait sans relâche et sans pitié…

— Hélas père, c’était peut-être ma faute !… »

Aussitôt son père se releva, la repoussant avec le regard moitié craintif, moitié furieux, de l’animal aux abois, sans même s’apercevoir que son brusque mouvement l’avait presque renversée.

« Je suis perdu, je suis perdu, s’écriait-il à chaque phrase, tandis qu’Ellenor lui rendait compte, aussi exactement que possible, des demi-révélations qui avaient pu éveiller les soupçons de son prétendu… Vous, Ellenor ?… trahi par vous !… »