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interrompit galamment son prétendu qui la voyait un peu embarrassée de continuer.

— Ce n’est pas de moi qu’il s’agit, reprit-elle, étonnée de s’entendre mentir ainsi… J’imagine simplement une situation possible. Un des proches de cette jeune fille, — un frère, si vous voulez, — a commis un acte qui, s’il devenait avéré, jetterait un fâcheux discrédit sur toute la famille, — un acte peut-être moins coupable, en réalité, que l’opinion publique, appelée à se prononcer, ne le jugerait immanquablement… Eh bien, cette jeune fille doit-elle rompre l’engagement contracté, dans la crainte où elle est d’exposer son mari au déshonneur qui peut, d’un moment à l’autre, rejaillir sur elle ?

— Certainement non,… à moins qu’elle ne lui ait fait connaître, au préalable, les motifs d’une résolution si extrême.

— Permettez !… Il faut encore supposer qu’elle ne le peut point.

— À votre tour, permettez !… je ne puis pas m’ériger en juge de cas de conscience purement hypothétiques. Avant de me prononcer, je veux avoir des faits réels à peser et à débattre… Voyons, Ellenor, de qui parlez-vous là ? continua-t-il un peu brusquement.

— De personne, en vérité,… de personne, répliqua-t-elle effrayée… Pourquoi supposer que j’aie quelqu’un en vue ? Ne m’arrive-t-il pas, chaque jour, de me placer dans telle ou telle situation critique, et de me demander ce que j’aurais à faire, ce que je ferais pour en sortir honorablement ?

— En ce cas, c’est bien de vous qu’il est question ?… Cette fiancée en l’air, dont le frère fantastique s’est rendu coupable d’un forfait imaginaire, est bien miss Ellenor Wilkins ?

— J’y consens, si cela vous arrange, répondit-elle