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lui procurer, sans lui faire encourir, le moindre péril, plus de profits qu’il n’en a réalisés par son crime. M. Wilkins a-t-il pris quelques mesures pour le faire arrêter en Amérique ?… Ce n’est pas, en somme, si malaisé.

— Vous ne connaissez guère les dispositions bénignes de votre hôte, cher monsieur Ralph. Il aurait sacrifié bien plus encore et supporté avec résignation de bien autres ennuis, plutôt que de courir après une vengeance.

— La vengeance est ici hors de cause ; il s’agit simplement de justice, de justice envers les autres comme envers soi-même. On y manque lorsqu’on laisse impunis des actes dont l’exemple peut devenir contagieux. N’en doutez pas, M. Wilkins a dû agir en ce sens.

— Il y a eu des annonces, effectivement. Une prime de vingt livres a été promise par la voie du Times.

— Vingt livres ?… Ce n’était guère.

— Précisément, je l’ai pensé comme vous ; j’en ai même parlé à Ellenor. Elle s’est mise à trembler de la tête aux pieds : — Ah ! me disait-elle, ce n’est pas vingt livres que je donnerais, c’est ma fortune…, c’est ma vie !… » Vous comprenez bien que lui voyant cette agitation, ce désordre d’esprit, je ne suis plus revenue avec elle sur cet inabordable sujet. »

Ralph, ainsi averti, se promit de ménager, lui aussi, la pauvre enfant dont l’état nerveux lui inspirait une pitié profonde. Le lendemain était un dimanche, et, pour la première fois depuis son rétablissement, Ellenor se sentait la force d’assister au service. Encore fallut-il l’intervention de son père pour l’y décider, car elle redoutait de se trouver au pied des autels, en face de l’omniscience divine. Elle partit de bonne heure pour l’église, appuyée au bras de son futur, et tâchant d’oublier le passé, de