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ce qu’étaient devenues les sommes détournées par lui…

« N’avait-il donc pas un ami à qui on pût s’informer de ses actions et de qui on eût droit d’attendre quelques indications au sujet de cet argent ? demanda Ralph, dont l’esprit sagace tâchait de suivre ces pistes incohérentes.

— Wilkins a écrit de tous côtés, lui fut-il répondu. Un seul parent a donné signe de vie, un cousin, négociant de la Cité. J’ai vu sa lettre ; elle se bornait à cette unique information que Dunster, il y a dix ans, avait prémédité de se transporter en Amérique, et qu’il avait lu, par manière de préparatifs, plusieurs relations de voyage en ce pays.

— Ces intentions, à dix ans de date, ne prouvent pas grand’chose, remarqua l’interlocuteur de miss Monro, secrètement égayé ; mais, reprenant aussitôt son sourire habituel : — A-t-il laissé des dettes à Hamley ?

— Pas que je sache, répliqua la bonne institutrice avec une sorte de regret, car elle se regardait comme obligée, envers les Wilkins, de jeter sur l’homme qui les avait trahis tout le blâme non contredit par la vérité des faits.

— Étrange histoire ! s’écria l’avocat.

— Pas si étrange, reprit-elle. Si vous aviez vu ces deux longues mèches qu’il ramenait sur son front chauve, son regard qui évitait sans cesse celui des autres, sa façon de manger avec son couteau lorsqu’il ne se croyait pas observé, mille autres détails enfin, vous ne trouveriez pas si étrange…

— Qu’il ait frauduleusement disparu, emportant l’argent de son associé ?… Pardon, miss Monro, mais je ne vois là aucune de ces habitudes extravagantes ou vicieuses qui expliqueraient un détournement pareil, un vol d’autant plus incompréhensible que la participation du coupable dans les bénéfices annuels de l’étude devait