Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/214

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne lui appartenait point de revenir sur des faits accomplis en dénonçant publiquement l’erreur, et la flétrissure paternelles. Elle prit seulement en elle-même le solennel engagement de ne jamais dévier, pour ce qui la concernait personnellement et privément, de la sincérité, de la loyauté la plus complète. Quant à l’avenir et aux terribles chances qu’il pouvait impliquer, elle, les abandonnerait à l’Être-Suprême, si pourtant — reconnaissez ici l’inspiration tentatrice, la suggestion du désespoir, — la Divine bonté voulait encore s’occuper d’une existence désormais fondée sur un mensonge.

En même temps se manifesta le châtiment infligé au principal coupable. M. Wilkins savait fort bien de quoi souffrait sa fille, sous quel poids fléchissait la juvénile énergie de cette enfant si courageuse, et ce qui lui faisait désirer une fin prématurée. Mais il ne lui était permis ni de la consoler, ni de la soigner comme il eût fait en toute autre circonstance ; ne fallait-il pas régler tous ses actes, toutes ses paroles de manière à n’éveiller aucun soupçon ? Des soupçons, il en voyait maintenant partout, et bien gratuitement à coup sûr. L’opinion publique, en effet, s’était si bien édifiée sur les prétendues causes de la disparition de Dunster, que si l’attorney fût venu se déclarer coupable et raconter, en pleine place publique, le jour du marché d’Hamley, comment les choses s’étaient passées, personne n’aurait voulu l’écouter. On n’aurait vu là que la preuve d’un dérangement d’esprit causé par les coups réitérés du destin. Entre un personnage d’excellente race, connu de tous depuis son enfance, et cet aventurier de Londres pour lequel les habitants de la petite ville professaient généralement une méfiance malveillante, pas une âme n’hésitait à se prononcer, et pas une volontiers ne fût revenue de son erreur.

Ajoutons à ceci le suffrage des domestiques, fort im-