Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/211

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’était pas trop de ces tristes symptômes pour éteindre, dans l’immense pitié qu’ils lui inspiraient, le mépris que ressentait Ellenor quand son père se dégradait devant elle par un des mille subterfuges auxquels il était réduit pour mieux détourner de lui tout soupçon.

Les choses, au reste, prenaient de ce côté le tour le plus favorable. On plaignait généralement M. Wilkins d’avoir placé sa confiance dans « un drôle comme ce Dunster, » capable de s’enfuir à la suite de détournements que la renommée commune disait très-considérables. On attribuait la consternation peinte sur ses traits à la conscience des embarras où cette désertion et ce vol allaient le jeter. Le sort, d’ailleurs, ne s’acharnait-il pas contre lui d’une étrange façon ? Avec la disparition de son associé coïncidait la maladie de sa fille. Aussi l’intérêt de tous leur était-il acquis. On eût regardé comme honteux de se montrer exigeant envers l’attorney et pas un de ses riches clients ne songeait à le presser, pour les rentrées dont il était chargé. Il n’y eut pas jusqu’à sir Frank Holster et son altière moitié, qui, mettant de côté leurs anciens, griefs, vinrent savoir des nouvelles d’Ellenor, et lui envoyèrent, par boisseaux, les fruits de leur serre.

M. Corbet se conduisait en amoureux bien appris, et manifestait les plus vives inquiétudes. Il écrivait chaque jour à miss Monro, réclamant d’elle un bulletin régulier. Il envoyait de Londres tous les appareils, tous les remèdes que les médecins de la capitale signalaient comme pouvant servir à la jeune malade. Il accourait en personne, pour peu qu’on fît luire à ses yeux l’espoir d’être admis auprès d’Ellenor, et lorsqu’il lui était permis de la voir, il la comblait de paroles si tendres, de caresses si vives, qu’elle se dérobait comme effrayée à ces témoi-