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lard… Il m’a offert de me raccompagner, ce dont je ne me souciais guère ; et j’ai refusé. J’ai repoussé avec une sorte d’incivilité sa proposition mal venue… Je ne voulais point causer affaires, me sentant la tête un peu prises… Je savais d’ailleurs de quoi il avait à m’entretenir… Quelques irrégularités, dont il prétendait se plaindre, dans la gestion de l’étude… Si quelqu’un nous a écoutés à ce moment, il a pu voir que je n’avais aucune envie de le garder avec moi… Pourquoi donc s’est-il obstiné ?… Pourquoi venir ainsi, malgré ma résistance ?… Il l’a voulu… Il a lui-même scellé son arrêt de mort.

— Eh bien, quoi ? reprit Dixon… s’il ne fallait que se laisser couper les deux mains pour le remettre sur pieds, on le ferait… on le ferait, en dépit de ses assommantes impertinences… mais on ne ressuscite pas les morts, et c’est chose dite… Ce qu’il faut maintenant éviter, c’est le mal qui peut résulter de l’aventure si elle s’ébruite… Mon idée, à moi, — et, vous, miss, quelle est la vôtre ? — c’est que ce cadet-là n’ayant ni parents ni amis qui s’inquiètent de lui, on pourrait bien, d’ici au jour, le loger sans rien dire, dans une bonne fosse… Nous avons devant nous, pour le plus, quatre heures de ténèbres… Je voudrais bien qu’il fût possible de le transporter au cimetière, mais il n’y faut pas songer… L’important, c’est de décider promptement où nous mettrons le pauvre diable. Je me charge d’enlever une belle tranchée de gazon sans en rien laisser paraître, et à nous deux, — monsieur et moi, chacun avec sa bêche, — nous caserons notre homme en lieu sûr, en le recouvrant de manière à ce que les plus fins ne puissent y rien débrouiller. »

Cette ouverture fut accueillie de part et d’autre par un silence profond. Au bout d’une minute ou deux, M. Wilkins reprit d’un ton plus animé : « Ah, mon pauvre père, s’il avait pu prévoir !… Mais affronter un procès criminel…