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tisme tempéré par beaucoup de cœur, de droiture et une grande distinction de manières. Ce n’est ni un antagonisme, ni une guerre, mais un malentendu entre gens excellents, qui se rencontrent et se comprennent toujours sur le terrain neutre du bien à faire.

L’intendant Horner, partisan aussi du progrès, mais dévoué à l’antique famille dont il gère les propriétés, est le type des anciens serviteurs de la noblesse. Un portrait non moins original et plein de verve, est celui de Miss Galindo, vieille fille, spirituelle, active, bienfaisante, s’accordant la satisfaction de blâmer ses voisins, et de tempêter contre les natures infimes que, par bonté, elle enrôle à son service.

Si l’on voulait chercher des défauts à une perle fine (il n’y en a pas, dit-on, de parfaites pour l’œil exercé du lapidaire), on pourrait reprocher à l’auteur d’avoir fait entrer dans son cadre un épisode de la révolution française qui, n’étant pas observé sur nature, fait tache au milieu de ces détails intimes, étudiés près à près et dont la vérité vous saisit et vous charme : mais qui voudrait s’arrêter aux défauts, là où il y a tant de qualités ?

Peu après la publication de Cranford et de Lady Ludlow, qui parurent dans Household-Words, recueil que dirigeait Dickens, Mrs Gaskell rentra dans la voie douloureuse par la biographie de Charlotte Bronté. Elle avait connu et aimé l’auteur de Jane Eyre, de Villette, etc. Elle l’avait visitée dans le triste presbytère, jeté au milieu d’un site sauvage du Yorkshire, âpre, austère, aux arbres rabougris, aux rudes habitants, aux neiges persistantes, où les quatre vents du ciel semblent se donner rendez-vous, et pendant les longues nuits