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pris fin ; celles de l’été ne s’annonçaient pas encore. L’état moral de son père accusait quelques changements incompréhensibles ; elle vivait plus seule, plus enfermée que jamais. En réalité cependant, elle ne songeait qu’au moment où les succès de Ralph, ces succès dont elle recueillait précieusement chaque témoignage, autoriseraient enfin leur union. Serait-ce pour cet automne ? Faudrait-il attendre un an de plus ? À ce délai, s’il était nécessaire, elle se résignait d’avance très-facilement. La lettre qui lui arrivait ponctuellement chaque semaine, et les visites que Ralph ne marchandait pas à M. Ness, ne devaient pas de sitôt lui être des compensations insuffisantes. Parfois même, il lui arrivait de souhaiter que le jour ne vînt pas trop vite, où elle échangerait les gâteries paternelles contre les débuts, toujours un peu austères, de la vie conjugale.


V


L’échéance de la fête de Pâques, fut cette année-là très-précoce. Ralph Corbet, qui mit à profit les vacances pour venir passer quelques jours auprès de sa fiancée, eut à supporter d’abord les rigueurs d’un printemps glacial. M. Wilkins et lui se virent un peu moins fréquemment que par le passé, mais toujours dans les meilleurs termes. Quant à Ellenor, que le jeune avocat voulait mettre de moitié dans ses visées ambitieuses, elle cherchait vainement en elle-même le germe de cette ardeur impatiente dont il semblait dévoré. L’idée de voir un jour son mari assis sur le sac de laine la flattait fort médiocrement. Ce n’était pas le lord-chancelier futur qui lui semblait aimable, mais bien le compagnon de sa jeunesse.