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le choix que vous paraissez avoir fait ne répond ni à mes espérances ni à celles de votre mère. Il peut sembler dégradant à une famille dans laquelle on va voir entrer la fille d’un homme dont la pairie remonte au règne de Jacques II. Que si, malgré tout, vous donnez suite à un projet insensé, la jeune personne associée à votre sort ne doit pas s’attendre à être reçue, comme leur fille, par les Corbet de Corbet-Hall. » À ces menaces, suffisamment péremptoires, la mère de Ralph crut devoir ajouter un post-scriptum encore plus énergique. Mais ce fut absolument peine perdue, et Ralph, en remettant la formidable épître dans un des tiroirs de son secrétaire, ne put s’empêcher de sourire. Il se sentait assuré de modifier les dispositions de sa mère aussitôt qu’il serait à même d’argumenter froidement avec elle, et quant à son père… le pauvre homme n’était pas de ceux dont l’opinion change le cours des choses. En attendant, il n’était pas nécessaire de désappointer M. Wilkins, qui comptait à bon droit sur le succès de son éloquente épître, ni d’inquiéter Ellenor, absorbée dans la félicité qui les enivrait tous deux. Autour d’elle tout souriait. Le jardin se couvrait des fleurs de l’été. Son père paraissait bien portant et satisfait. Jamais miss Monro ne s’était montrée si indulgente. M. Dunster seul, avec sa figure de parchemin, ses airs affairés, ses continuelles visites, faisait ombre au tableau et détonnait, comme une note criarde, dans cet harmonieux ensemble.

Ellenor avait fait, on le sait déjà, sa première apparition aux assemblées de Hamley où, comme on aurait pu le prévoir, sa grâce un peu gauche, son élégante timidité ne la mirent point à l’abri de certaines objections aigres-douces. Quelques vieilles douairières se plaignirent de la présomption qu’elle montrait en venant s’asseoir à côté de leurs filles. Par un bonheur inespéré, la femme qui por-