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consoler par quelques bonnes paroles, et je m’assis à côté de lui.

Tandis que je cherchais un prétexte à conversation, il se prit à bâiller comme un homme que la fatigue accable.

« Vous êtes donc las, mon pauvre Tim ? lui demandai-je aussitôt.

— Un peu, répondit-il, mais à présent je vais pouvoir m’en retourner chez nous.

— Étiez-vous donc ici depuis bien longtemps ?

— Dame ! j’y ai passé toute la journée, ou peu s’en faut, depuis sept heures du matin tout au moins.

— Et que faisiez-vous, grand Dieu ?

— Rien du tout.

— Alors pourquoi rester là ?

— Pour éloigner les charrettes. »

En me répondant ainsi, le lourdaud, maintenant debout, étirait ses grands bras et dérouillait ses membres avant de se mettre en route.

« Les charrettes !… quelles charrettes ? lui demandai-je fort surpris.

— Les charrettes qui auraient réveillé cette petite. C’est aujourd’hui le marché de Hornby… Ne le savez-vous donc pas ?… Seriez-vous aussi un idiot, vous qui parlez ? »

Et il me toisait d’un air narquois, comme pour prendre la jauge de mes facultés intellectuelles.

« C’est à cela que vous avez passé toute la journée ? repris-je sans laisser voir aucune émotion.

— Mais oui. Je n’avais rien à faire, puisque le ministre ne veut plus de moi. Pourriez-vous me dire comment va l’enfant ?

— On espère que ce long sommeil lui fera du bien. En attendant, Timothy, dormez tranquille, et que Dieu vous bénisse ! »