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XVI


J’arrivai malheureusement un peu tard à ce pieux rendez-vous, et l’église étant comble, force me fut de rester sous le porche, en assez nombreuse compagnie, attendu qu’il commençait à neiger et qu’une partie des paroissiens, au sortir de l’office, hésitaient à se mettre en route. Je n’écoutais guère les propos qu’ils échangeaient sans prendre garde à moi, jusqu’au moment où vint à être prononcé le nom de Phillis Holman.

Ce nom me fit dresser l’oreille, et je ne perdis plus un mot de ce qui se disait dans un des groupes voisins.

« Jamais on ne vit pareil changement.

— C’est un gros rhume, à ce que prétend sa mère.

— Ah ! qu’elle y prenne garde ! ajouta un, troisième interlocuteur. Phillis est d’une famille où l’on ne fait pas de vieux os. Lydia Green, sa tante maternelle, est morte d’une maladie de langueur justement à l’âge qu’a maintenant cette jeune fille. »

Ces pronostics sinistres m’avaient déjà fort affecté, quand mes parents sortirent enfin et m’abordèrent avec les vœux d’usage à ce moment de l’année.

Je jetai du côté de Phillis un regard furtif ; elle était certainement grandie, amincie, maigrie de plus, il n’y avait pas à le nier ; mais l’éclat passager de son teint, me déguisant la triste vérité, calma aussitôt mes craintes. Ce fut seulement à la ferme que je constatai son extrême pâleur et la navrante expression de ses yeux gris, qui semblaient avoir reculé dans leurs orbites profondes.

Du reste, elle ne se plaignait point et vaquait aux soins du ménage avec la même activité que jadis. J’inclinais à