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soleil traverse de loin en loin ces sombres scènes. Les yeux se reposent sur la suave figure de la jeune aveugle, sur celle du vieux Job Legh, l’amateur naturaliste, que son innocente passion pour les insectes préserve des rancunes qui fermentent au cœur de ses camarades : et ce dernier portrait n’est pas de fantaisie.

« L’histoire naturelle a de fervents adeptes parmi ces hommes intelligents et simples. Il s’en trouve à qui les œuvres de Linnée sont aussi familières que les plantes de leur propre canton, qui se donnent le luxe d’un jour de vacance à l’époque où va s’ouvrir certaine fleur, et s’en vont, un morceau de pain dans leur poche, battre les champs ou les bois pour y trouver la plante qui manque à leur herbier. »

Une touchante étude, faite aussi d’après nature, est celle de la pauvre Alice : le délire lui rend ses souvenirs d’enfance ; elle revoit la ruche près du cottage, le nid de linotte qui est là dans les branches, la mère sur ses œufs. « Comme son regard est brillant ! chère mignonne ! Elle ne s’envolera pas ? » Un souffle printanier rafraîchit le front fiévreux de la mourante : un jour pur éclaire la sombre demeure ; c’est la brise d’un meilleur monde, l’aube de l’éternelle clarté.

Mary Barton parut en 1848, et fit grande sensation. Les ouvriers lurent le livre avec avidité. Les patrons se plaignirent. On cria au communisme. On accusa l’auteur, resté anonyme, de mettre la grève en honneur, de raviver les hostilités, de diviser plus profondément les deux camps. C’était le contraire que Mrs Gaskell avait voulu. En montrant les choses au vrai, elle espé-