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AUTOUR DU SOFA.

« Marguerite, dit-elle en se retournant vers moi, où allons-nous ? »

Henry Gregsone, car c’était lui, commençait à comprendre qu’il avait commis une grande faute, et restait immobile, n’ayant pas la force de bouger. Milady le regarda ; elle vit la terreur qu’inspirait au bambin la manière dont son aveu était reçu, et oubliant sa colère :

« Mon pauvre enfant, reprit-elle avec douceur, entre quelles mains êtes-vous tombé ! »

Les lèvres d’Henry s’agitèrent et ses yeux s’emplirent de larmes.

« Vous ne connaissez pas l’arbre fatal dont il est parlé dans la Genèse, continua lady Ludlow ; j’espère que vous ne lisez pas assez couramment pour cela. Qui est-ce qui vous a enseigné à lire et à écrire ?

— Si vous plaît, Votre Seigneurie, je ne croyais pas faire mal, répondit le jeune gars d’une voix troublée ; il était évidemment beaucoup plus ému de la douceur de milady, qu’il ne l’aurait été par sa colère.

— Je vous ai demandé qui vous apprenait à lire.

— Le commis de M. Horner, Votre Seigneurie.

M. Horner le sait-il ?

— Oh ! oui ; c’est pour lui faire plaisir que M. Smith me l’a montré, et maintenant c’est lui qui me donne des leçons.

— Peut-être n’est-ce pas vous qu’il faut blâmer, reprit milady ; mais je ne comprends pas M. Horner. On a mis en votre possession des armes tranchantes ; vous a-t-on appris certaines règles indispensables, relativement à l’usage que l’on doit en faire ? Vous a-t-on jamais dit qu’il ne faut pas ouvrir une lettre ?

— Si vous plaît, milady, elle n’était pas fermée ; M. Horner avait oublié de la cacheter.

— Mais on ne doit jamais lire une lettre qui ne vous