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AUTOUR DU SOFA.

toutes les fois qu’il s’agissait de payer les intérêts échus, ou que milady se refusait une dépense personnelle qu’aurait exigée, d’après le vieil intendant, la position qu’occupait l’héritière des Hanbury. Ses équipages, vieux et lourds, n’étaient plus en rapport avec ceux des autres nobles du comté. M. Horner parlait quelquefois de faire faire un nouveau carrosse ; mais la pénurie d’argent s’y opposait toujours. Les chevaux avaient gagné l’âge de la retraite, et cependant tous les poulains qui, nés sur le domaine, auraient dû les remplacer, étaient échangés contre un sac de viles espèces, au moment où ils auraient pu servir. Le fils de Sa Seigneurie était ambassadeur à Vienne ; toute la maison était fière de tant d’honneur, mais c’était une source de dépenses qui absorbait tous les revenus de milord ; et sa mère se serait réduite au pain et à l’eau plutôt que de lui demander un sou pour éteindre cette malheureuse hypothèque dont, en fin de compte, il avait tout le bénéfice.

L’ancien lord Ludlow, le père de celui-ci, était dans la marine et dépensait à tort et à travers, comme le font tous les marins, d’après ce que l’on m’a dit, car je ne sais rien de la vie maritime. En dépit de sa prodigalité, milord n’en avait pas moins grand soin de ses propres intérêts, ce qui semblerait dire qu’il joignait un certain égoïsme à tous ses goûts de dépense. Malgré cela, milady l’avait beaucoup aimé ; je ne crois pas qu’il y eût au monde une femme à qui la mémoire d’un mari inspirât plus de tendresse et d’orgueil. Aussi ne pardonnait-elle pas à son vieux régisseur la désapprobation tacite qu’il donnait à cette malencontreuse hypothèque dont elle avait grevé son patrimoine au profit de celui du comte.

M. Horner, qui était né sur le domaine d’Hanbury, avait passé une partie de sa jeunesse chez un avoué de Birmingham, où il avait acquis une habitude des affaires