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AUTOUR DU SOFA.

— Je ne sais pas ce que vous voulez dire, mais je vous aimerai quoi qu’il arrive ; ne me cachez rien, je peux tout savoir.

— Mon père est mort, dit Owen après un instant de silence.

— Que Dieu lui pardonne ! s’écria Nest, en pensant à son fils.

— Qu’il ait pitié de moi ! dit Owen d’un air abattu.

— Est-ce que vous l’auriez… elle n’acheva pas sa phrase.

— Oui, c’était ma destinée ; comment aurais-je pu m’y soustraire ? Tu sais tout maintenant ; hélas ! c’est le démon qui a été cause de sa chute ; moi, j’ai plongé pour le secourir, j’ai tout fait pour le sauver, Nest ; je me suis presque noyé ; mais il était mort, il s’était tué en tombant.

— Il est au fond de la mer ? demanda Pritchard avec vivacité.

— Non, il est dans mon canot, répondit Owen qui tressaillit au souvenir de l’impression qu’il avait eue en soulevant le linceul.

— Je vous en prie, changez de vêtements, » lui dit sa femme, à qui la mort de sir Griffith paraissait indifférente.

Pendant qu’elle aidait Owen à défaire ses habits, et à revêtir ceux qu’elle lui avait apportés, Pritchard mêlait, dans un gobelet énorme, une liqueur spiritueuse avec de l’eau chaude et s’occupait du souper. À force d’instances, il parvint à faire boire un peu de son breuvage fortifiant à son gendre, et à lui faire manger quelque chose, ainsi qu’à sa fille, qui, pour lui plaire, avala quelques bouchées de gâteau d’avoine. Tout en faisant les préparatifs du départ, et en pensant aux moyens à prendre pour cacher la manière dont le squire était mort, le pêcheur songeait