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LA DESTINÉE DES GRIFFITH.

quel sir Griffith le condamna, jusqu’à ce qu’un chirurgien eût examiné la contusion de Robert.

Ce n’est qu’en entendant fermer et barrer la porte sur lui, comme on eût fait pour s’assurer d’une bête féroce, que l’abandon où se trouvait la pauvre Nest revint à la mémoire du prisonnier. Comme elle devait souffrir de ne pas l’avoir près d’elle ! Comme elle devait l’appeler au milieu de ses larmes ! Et que pensait-elle de son absence ? Ne supposait-elle pas qu’il avait obéi à son père, et qu’il lui reprenait son amour au moment où elle en avait le plus besoin ? Cette pensée le rendait fou, et il chercha autour de lui un moyen d’évasion quelconque.

On l’avait enfermé au premier étage, dans une petite chambre, dépourvue de meubles, et dont la porte massive aurait défié les efforts de dix hommes vigoureux ; mais la fenêtre, comme dans la plupart des maisons galloises, était placée au-dessus du foyer ; le corps de cheminée, qui se séparait en deux branches, faisait saillie à l’extérieur, et de ce côté la fuite était possible, même pour un homme moins alerte et moins désespéré que notre captif.

La pluie avait cessé et de pâles rayons de soleil traversaient l’air humide, pendant qu’Owen, échappé de sa prison par la voie que nous avons décrite, gagnait à la dérobée un endroit du parc donnant sur des rochers, d’où il était souvent descendu, au moyen d’une corde bien assujettie, dans un petit bateau à voile que son père lui avait donné jadis, et qui était amarré au pied de la falaise. Il avait choisi cet endroit pour y mettre son canot, parce que c’était le point d’abordage le plus rapproché du manoir ; mais pour y arriver, sans traverser une grande pelouse qui se déployait devant la maison, il fallait faire un long détour, en se glissant au milieu d’un taillis dont les cépées avaient à peine la hauteur d’un arbrisseau. Courbé vers la terre, le fugitif avançait peu