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AUTOUR DU SOFA.

et maintenant qu’elle était sa femme, elle employait toutes ses facultés à le dédommager des ennuis qu’il éprouvait ailleurs. Elle trouvait chaque jour de nouvelles paroles pour lui exprimer sa tendresse ; elle n’avait d’autre étude que de se conformer à ses goûts, et le lui prouvait par l’emploi de son temps, par sa toilette et par le tour de ses pensées.

Il n’est donc pas surprenant qu’Owen songeât avec plus de bonheur et de gratitude au jour de son mariage qu’il n’arrive d’ordinaire lorsqu’on a fait une mésalliance ; il n’est pas étonnant qu’il fût aussi ému qu’autrefois, quand il approchait de Ty-Glas, et qu’au détour du sentier, malgré l’âpreté de la bise d’hiver, il apercevait Nest guettant son arrivée dans l’ombre.

Il oubliait alors les paroles irritées, les actes malveillants qui l’avaient blessé au manoir, pour ne songer qu’à l’amour dont il était l’objet ; et il aurait défié ses ennemis de troubler son repos et son bonheur, s’il s’était rappelé leurs efforts impuissants.

Dix mois passèrent, et l’automne allait finir, quand un matin, accourant à Ty-Glas où l’avait appelé un message mystérieux d’Ellis, Owen, salué en entrant par un faible cri, s’approcha de Nest, qui, pâle et souriante, lui présenta son fils, et lui parut plus belle que le jour où elle avait gagné son cœur à l’auberge de Penmorfa.

Mais la malédiction faisait son œuvre, et la prophétie devait bientôt s’accomplir.