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AUTOUR DU SOFA.

égard. Le baptême n’existe point chez les anabaptistes ; il en résulte nécessairement que le pauvre bébé qui naît parmi ces hérétiques est privé de parrains et de marraines qui répondraient de son salut ; vous en conviendrez avec moi. »

Sa Seigneurie inclina silencieusement la tête.

« Or, vous savez, poursuivit miss Galindo, que nos parrains et marraines s’engagent pour nous, sous la foi du serment, à un âge où nous ne pouvons faire que crier et baver pour nous-mêmes. C’est un grand privilège, il faut bien le reconnaître, et il ne doit pas nous rendre trop sévères pour ceux qui n’ont pas eu la même chance. Il y a des individus qui sont nés avec une cuiller d’argent dans la bouche ; ceux-là ont un parrain qui leur apprend le catéchisme et qui veille à ce qu’ils soient confirmés dans le sein de la véritable Église. Il en est d’autres qui ne trouvent à leur naissance que des cuillers de bois, pauvres déshérités qui ne profitent pas du baptême, et qui ne peuvent être que dissidents jusqu’à leur mort. Si par-dessus le marché, ils viennent à être dans le commerce c’est encore pis, j’en conviens ; mais ayons assez d’humilité, chère milady, pour ne pas lever trop haut la tête parce que nous sommes nées orthodoxes.

— Vous allez trop vite, et je ne peux pas vous suivre répliqua Sa Seigneurie ; les dissidents, autant que je puis le croire, sont les serviteurs du démon. Pourquoi n’ont-ils pas la même croyance que nous ? C’est très-mal. Je les tiens pour schismatiques, et vous savez que la Bible assimile les hérétiques aux sorciers. »

Milady, comme on peut le voir, n’était pas convaincue. Après le départ de miss Galindo, elle envoya chercher, par mistress Medlicott, certains livres qui se trouvaient dans la grande bibliothèque, et les fit emballer sous ses yeux.