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LADY LUDLOW.

le capitaine s’était posé tout d’abord en agent responsable de l’administration de la terre qu’on l’appelait à régir, et par conséquent voulait avoir toute liberté d’action. Il avait commandé trop longtemps à des hommes, pour se laisser conduire par une femme, alors même que cette femme était lady Ludlow. Je suppose que c’était l’un des traits de ce rare bon sens dont Sa Seigneurie nous avait fait l’éloge ; toutefois quand le sens commun nous désapprouve et lutte avec succès contre notre manière de voir, je ne crois pas que nous sachions l’apprécier à sa juste valeur.

Lady Ludlow était fière de sa capacité administrative ; elle aimait à nous dire que son père avait l’habitude de l’emmener dans les courses à cheval qu’il faisait sur ses domaines ; que le vieux comte ne manquait pas d’attirer les regards de sa fille sur les divers objets dont il était frappé, et lui recommandait surtout de ne jamais permettre qu’on fît telle ou telle chose. La première fois qu’elle avait raconté cela au capitaine, celui-ci lui avait répondu à brûle-pourpoint que, d’après M. Smithsone, les fermes étaient fort mal tenues, les payements très-arriérés, et qu’il avait l’intention d’étudier l’agriculture avec zèle, afin de voir par quel moyen on pouvait remédier à tout cela. Milady fut très-surprise en écoutant un pareil langage ; mais qu’y pouvait-elle faire ? que dire à un homme qui parlait d’employer toute son énergie à triompher de son ignorance, le seul défaut qui lui eût été reproché par les personnes assez audacieuses pour en faire l’observation.

Le capitaine s’était donc mis à lire avec ardeur les promenades agricoles d’Arthur Young, et hochait la tête d’un air peu satisfait chaque fois que milady lui parlait du genre d’assolement qui de temps immémorial était suivi par ses fermiers. Lorsqu’il eut fini sa lecture, il en