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AUTOUR DU SOFA.

et leur ameublement ; c’est alors qu’ils firent connaissance avec lady Ludlow. Je serais fort embarrassée de vous dire comment il se fait que miss Laurentia plût à Sa Seigneurie ; cette dernière, qui faisait partie de l’ancienne noblesse, était calme et douce, pleine de grandeur et de majesté dans ses manières. Miss Galindo avait toujours dû être fort vive, même un peu brusque ; et son énergie s’était toujours révélée d’une façon excentrique ; mais je n’ai pas la prétention de vous expliquer cette étrange anomalie, je raconte les choses telles qu’elles se sont passées ; et le fait est que la comtesse élégante, et difficile en matière de relations, fut entraînée par la jeune provinciale, qui de son côté adora milady.

Cette connaissance, qui flattait leur vanité, confirma sir Hubert et sa femme dans leurs vues ambitieuses : à quelle position leur fille ne pouvait-elle pas prétendre, elle qui devait avoir plus tard deux cent mille francs de rente, et qui se trouvait lancée parmi les comtes et les ducs de la plus ancienne origine ? Il en résulta qu’après leur retour au manoir, ils refusèrent nettement les propositions de Mark Gibson, lorsque celui-ci vint offrir à Laurentia Galindo son cœur et sa main, appuyés de la perspective d’un revenu de vingt mille francs. En vain demanda-t-il qu’on lui permît de s’adresser à son amie d’enfance ; on lui répondit qu’on le lui accorderait aussitôt que la jeune fille aurait été prévenue, par ses parents, du motif de la visite de Mark ; c’est-à-dire quand ceux-ci auraient pris le temps de soumettre à Laurentia tous les arguments qui peuvent persuader à une fille laide, ayant conscience de sa laideur, que le soupirant qui la demande n’a pas songé à l’épouser tant qu’elle avait été pauvre, et que c’est de la cassette, non de la personne, que l’amoureux est épris.

Dieu seul pourrait dire jusqu’à quel point cette suppo-