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AUTOUR DU SOFA.

eu des rapports qui doivent exister entre maître et tenanciers.

Quant au besoin d’argent, c’était un malheur qu’elle pouvait réparer, disait-elle, en mettant plus d’économie dans ses propres dépenses, économie qui pourrait bien monter à quelque cinquante livres[1]. Mais dès que le procureur parla de certaines réformes qui touchaient au bien-être des autres, ou à la splendeur nécessaire à la grande famille des Hanbury, lady Ludlow fut inflexible. Des quarante domestiques dont sa maison était composée il y en avait au moins vingt qui n’étaient plus capables de remplir leurs devoirs ; on pouvait, d’après les calculs de M. Smithsone, épargner plusieurs centaines de livres, en mettant à la retraite ces bons vieux serviteurs ; mais Sa Seigneurie ne voulut pas même en entendre parler ; non plus que de nous rendre à nos parents, chez qui M. Smithsone insistait pour qu’on nous renvoyât.

« S’il m’est impossible de remplir mes engagements, répliqua lady Ludlow, il me faudra bien renoncer, dans l’avenir, à une chose qui a toujours été pour moi une source de vive satisfaction ; mais je suis liée envers ces jeunes filles qui m’accordent la faveur de vouloir bien demeurer chez moi ; et je ne peux pas, vous le comprenez, M. Smithsone, rétracter la parole que j’ai donnée à leurs familles. »

Elle entra, en disant ces mots, dans la pièce où je me tenais habituellement ; le procureur, dont elle était accompagnée, se douta bien que j’avais dû entendre ce qu’il avait dit à notre égard, et en éprouva une certaine émotion ; quant à milady, son visage conserva toute sa sérénité. La terre entière pouvait surprendre ses paroles, toujours bienveillantes et pures, sans qu’elle éprouvât la

  1. Douze cent cinquante francs.