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AUTOUR DU SOFA.

me semble que j’étais destinée à employer mon temps à écrire.

— Auteur, miss Galindo !

— Certainement ; tout était préparé. M. Burney me donnait des leçons de musique, pour laquelle je n’avais pas la moindre disposition, c’était un caprice de mon père. Miss Burney fit un livre, elle était fort jeune, tout simplement fille d’un maître de musique ; pourquoi n’aurais-je pas fait comme elle ? Je pris donc une main de papier, deux paquets de plumes, une bouteille d’encre.

— Et ensuite ?

— Une fois la plume à la main, je n’ai rien trouvé à dire, et j’en suis restée là ; mais quand par hasard j’ouvre un livre, je suis toujours surprise de m’être laissé arrêter par une raison aussi futile, puisqu’elle n’empêche pas les autres d’écrire.

— Vous avez très-bien fait, miss Galindo, répliqua Sa Seigneurie. Je m’élève fortement contre les femmes qui usurpent les fonctions des hommes ; mais peut-être cette idée qui vous est venue d’écrire un livre a-t-elle amélioré votre écriture ; c’est l’une des plus lisibles que je connaisse, elle est vraiment fort belle.

— J’ai toujours méprisé les z qui n’ont pas de queue, dit la vieille fille, enchantée de l’éloge qu’elle venait de recevoir.

— Voulez-vous me permettre de vous montrer un ancien cabinet dont les sculptures sont précieuses et que mon fils a trouvé en Hollande ? lui demanda Sa Seigneurie. »

Elles passèrent dans la pièce voisine où était le susdit meuble, et l’affaire des émoluments fut réglée, ou du moins je le suppose, car il n’en fut plus question.

Lorsqu’elles revinrent, ces dames parlaient de M. Gray, que miss Galindo était loin d’épargner. « Un pauvre garçon, qui ne prononcerait pas un mot devant une oie sans